Au début de l’été, toute la presse s’est fait l’écho d’une étude britannique sur le cannabis et son influence sur la qualité du sperme, titrant que la consommation de cannabis doublerait le risque d’infertilité masculine. Depuis, de nombreuses voix se sont élevées pour préciser les données de l’étude, un communiqué de presse ayant livré un raccourci erroné. Le point sur la réelle influence du cannabis sur le sperme.

 

Spermatozoïdes qui se déplacent

 

L’étude en question, parue dans la revue médicale Human Reproduction, a porté sur le sperme d’environ 2 000 hommes qui avaient consulté dans une dizaine de cliniques au Royaume-Uni pour des problèmes de fertilité. En plus de l’analyse de leur sperme, les chercheurs s’étaient renseignés sur le mode de vie de ces patients : indice de masse corporelle, nature de l’emploi, type de sous-vêtements portés et consommation d’alcool, de drogue ou de tabac dans les trois mois précédant le prélèvement de sperme. Et la conclusion de ces chercheurs est que les habitudes de vie d’un individu – fumer des cigarettes ou porter des boxers par exemple – ne changent pas significativement son taux de spermatozoïdes normaux.

Moins de spermatozoïdes ?

Pour autant, la consommation de cannabis est-elle anodine ? Ces travaux indiquent que la seule situation dans laquelle une influence significative du style de vie est notée est en effet celle de la consommation de cannabis dans les trois mois ayant précédé l’éjaculation. Mais uniquement pour les hommes de 18 à 30 ans, chez qui le risque d’un taux de spermatozoïdes normaux moindre est quasiment doublé. En revanche, les hommes de 31 à 40 ans voient ce risque diminuer et n’avoir même aucune valeur statistique. Idem au-delà de 40 ans. Les chercheurs ont également trouvé que la corrélation entre consommation de cannabis et risque de voir son taux de spermatozoïdes normaux diminuer disparaît lorsque la consommation a eu lieu plus de six jours avant le prélèvement de sperme !

Pour résumer, oui le cannabis influe sur la morphologie des spermatozoïdes mais seulement chez les 18-30 ans et de façon rapidement réversible. Surtout, ce risque est nettement inférieur à celui de la saison à laquelle l’éjaculation a eu lieu ! Ces mêmes travaux montrent en effet qu’une éjaculation entre juin et août double nettement le risque de voir chuter le taux de spermatozoïdes normaux chez son émetteur par rapport à un prélèvement réalisé au printemps.

Il n’est en tout cas pas possible de déduire d’une telle étude que le cannabis nuit à la fertilité de ces messieurs. D’ailleurs, tous les travaux menés en ce sens sont jusqu’à présent restés controversés. L’équipe de chercheurs britanniques recommande seulement de restreindre l’usage de cannabis au moins trois mois avant de se lancer dans l’aventure de la procréation. Quant à expliquer le déclin de la fertilité, bien réel lui, depuis une trentaine d’années dans de nombreux pays développés, les Nations unies et l’Institut de veille sanitaire français penchent plutôt vers les perturbateurs endocriniens présents dans l’environnement (pesticides, bisphénols, plastifiants, solvants, cosmétiques…) mais sans rien pouvoir affirmer encore. Les recherches se poursuivent, pour tenter d’expliquer pourquoi le sperme de 20 à 40 % des jeunes hommes européens est passé sous le seuil de fertilité.